L’EXPLOITATION DU CANAL DE BRIARE L’Organisation administrative du canal La Compagnie des
Seigneurs du Canal de Loire en Seine siégeait à Paris. Les réunions avaient lieu le plus souvent en l’hôtel du sieur Charreton L’assemblée de la Compagnie Les associés se réunissaient
périodiquement le jeudi de chaque semaine. La conduite générale de l’entreprise avait été, dès le début assurée par un directeur asisté d’un seul contrôleur. Mais la Compagnie s’aperçut rapidement que la
présence sur les lieux d’un seul associé n’était pas suffisante. Trois contrôleurs se virent confier les pleins pouvoirs pendant un an pour conduire toutes les affaires du canal. Le contrôle de l’assemblée
était sévère. Aucun associé ne pouvait prendre de son propre chef une décision sans y avoir été autorisé par une délibération de l’assemblée. Les décisions étaient prises à la majorité des membres présents
avec un quorum de cinq associés. Le personnel Le personnel de la Compagnie se composait de commis, gardes, éclusiers et autres agents. L’organisation administrative du canal était dirigée par un commis
général installé à Paris. C’était à lui qu’incombait la charge de la comptabilité de la Société. Trois autres commis assuraient la perception des droits de péage et la surveillance. Ils avaient sous leurs
ordres les chefs mariniers, les gardes, les éclusiers et les ouvriers. Ils devaient veiller à la conservation des ouvrages et s’occuper de leur entretien. La surveillance du canal et de ses dépendances était
assurée par un certain nombre de gardes sous l’autorité d’un garde général. Au début la Compagnie n’avait eu que douze gardes, mais dès 1648 vingt et un gardes furent engagés pour surveiller le canal. A ces
gardes du canal s’ajoutent des gardes particuliers pour surveiller et protéger les seigneuries de la Compagnie. Il y a des gardes-chasse et des gardes-forestiers à Briare, Champoulet et Dammarie. Ils
poursuivent les braconniers et assurent l’exécution des baux de pêche dans les étangs. Le menu personnel était composé des éclusiers, des hommes d’équipe, des employés des commis et des ouvriers qui
travaillaient pour la Compagnie à l’entretien du canal, des rigoles ou des nouveaux ouvrages. Ces derniers étaient groupés en chantiers ou « ateliers ». Tout ce personnel était plaçé sous
l’autorité de directeur du canal François Boutheroüe.
Tarifs et réglementations de la navigation Tarifs
Les lettres-pattentes de septembre 1638 avaient accordé le privilège exclusif de la navigation sur le canal de Briare, ce qui revient à dire
que la Compagnie devait assurer le transport des marchandises. Mais un tel système présentait de gros inconvénients car les Seigneurs associés étaient obligés d’acheter, d’entretenir et de faire convoyer un
grand nombre de bâteaux. D’autre part les cargaisons qui arrivaient de Briare sur les bateaux de Loire devaient être déchargées puis rechargées sur les bateaux de la Compagnie d’où perte de temps et frais
inutiles. De plus les marchands n’hésitaient pas à demander des dommages et intérêts quand des retards, des accidents ou des pertes se produisaient dans les cargaisons. Avec tous ces inconvénients, les
Seigneurs du Canal s’adressèrent au roi en demandant l’autorisation de remplacer le privilège de navigation qui leur avait été concédé par des droits de péage qu’ils percevraient selon un tarif déterminé. La
navigation devenait donc libre, les bateaux étant affrètés par les marchands et circulant à leurs risques et périls. En décembre 1642, le roi accepta de substituer leur privilège et établit un barème pour le
paiement des droits de chaque marchandise. Par exemple un poinçon de vin, jauge d’Orléans était taxé 1 livre 10 sols ; un cent de solives ou de bois carré coutait 15 livres ; un cent de carpes
revenait à 5 livres 10 sols, etc.Les droits de circulation des marchandises sur le canal de Briare ne devaient jamais être modifiés par la suite jusqu’au rachat du canal par l’Etat en 1860.
Réglementations de la navigation Les bateaux circulant sur le canal marchent à la file les uns des autres, de façon à laisser le passage libre à ceux qui viennent à leur rencontre. A l’arrêt ou à
l’entrée des écluses, ils doivent se ranger le long des berges. Il est interdit aux mariniers d’ouvrir eux-mêmes les portes des écluses. La circulation est interdite la nuit et elle est permise les jours
fériés et les dimanches sauf pour Noël, Pâques, Pentecôte et la Toussaint. Il est défendu aux marchands de déposer des marchandises sur les levées et digues des canaux ; de laisser au repos sur le canal
des bateaux chargés ; de polluer les eaux en y jetant des immondices ou des marchandises avariées.Pour le passage des écluses un ordre de préférence est établi. Les poissons, les
fruits, les vins l’huile, le savon, les grains et le papier sont prioritaires sur le fer, le charbon, les ardoises, le bois et les ocres, qui passent aux écluses selon leur ordre d’arrivée.
Les bateaux qui circulaient sur le canal étaient des chalands construits en bois de quinze à vingt mètres de longueur sur quatre mètres de largeur. Leur charge maxima atteignait près de cinquante tonnes. Ils
étaient halés à col d’hommes quelquefois par des chevaux. Ils portaient souvent une voile sur un mât mobile (à cause du passage des ponts) qui facilitait la marche quand le vent était favorable. Chaque bateau ne devait pas avoir moins de deux haleurs. Une longue corde, dite « verdon » d’environ quatre vingt mètres, était attachée par son milieu à la proue du bateau. A
chacune de ses extrémités étaient nouées de larges sangles appelées « lacs » que les hommes se passaient en travers de la poitrine. Le halage était double c’est-à-dire que les hommes tiraient les
bateaux à la fois sur les deux berges du canal. Il y avait diverses catégories de bateaux : Les flûtes pour le transport des vins ; les cabanes ou bateaux couverts pour les
marchandises périssables ; les bascules pour le poisson vivant ; les chalands pour les marchandises lourdes ; les sentines, barques légères et rapides ; les bâtards, tenant du chaland et
de la flûte et enfin les coches pour le transport des voyageurs. Le coche d’eau
Le coche partait de Briare chaque semaine et atteignait Paris en quatre ou cinq jours. Précédé d’un coureur qui
annonçait son arrivée aux éclusiers, le coche jouissait d’une priorité de passage absolue. Dès son approche tous les bateaux devaient immédiatement se garer et lui céder le chemin en abaissant leurs cordes
de halage. Le coche ne pouvait transporter que les voyageurs et les paquets d’un poids inférieur à cinquante livres. Ce coche d’eau fonctionna jusqu’au milieu du XIXème
siécle, époque à laquelle il fut détroné par le chemin de fer. Source
: D’après Pierre Pinsseau, Le Canal Henri IV ou canal de Briare, Paris : Office d’édition du livre d’histoire, 1997. |